Hommage à la Chasse Française de 1940 (1ère partie)

Des warbirds français de la Seconde Guerre Mondiale il ne reste plus que deux exemplaires, l’un basé à Duxford, l’autre en Suisse. Lors de leurs déplacements en France pour un meeting ou pour une exposition, ils déclenchent une certaine émotion… et ce, grâce à leurs propriétaires. Alors aujourd’hui pour les remercier de sauvegarder le patrimoine aéronautique français nous allons leur consacrer cet article.

CURTISS HAWK 75 C-1

Historique

Firme réputée pour ses réalisations dans le domaine des hydravions et des biplans de combat ou d’entrainement pour les forces américaines, Curtiss commença en 1934 l’étude d’un chasseur monoplan moderne entièrement métallique. Appelé Curtiss Model 75, l’appareil était un monoplan profilé à cockpit fermé et train rétractable. Le prototype fit son premier vol en mai 1935 et termina deuxième dans un comparatif destiné à définir un nouveau chasseur pour l’U.S. Army Air Corps. Les responsables américains prenaient alors conscience du fait que les chasseurs biplans allaient devenir obsolètes. Le chasseur de Curtiss fut donc commandé en juillet 1936 sous la désignation P-36. Un lot d’avion de présérie désignés Y1P-36 fut suivi du premier type de production, le P-36A.

Un P-36A Hawk preservé aux couleurs américaines (Photo USAF)

Les livraisons aux unités de l’U.S.A.A.C commencèrent au printemps 1938 avec 180 exemplaires plus 30 unités du P-36C amélioré et plus lourdement armé. A cette date, il s’agissait des avions les plus modernes de la force aérienne américaine. Mais au moment de l’entrée en guerre des Etats-Unis en décembre 1941, et bien que périmés, les P-36 engagèrent les premiers combats contre les forces japonaises sur le théâtre du Pacifique. Le Model 75 intéressa nombre de pays étrangers potentiellement acheteurs comme la France, la Norvège ou les Pays-Bas. Le principal acheteur fut la France qui reçut quatre versions différentes du Hawk 75 dont une avec un moteur Wright Cyclone. Ce fut l’avion de combat le plus moderne dont la chasse française disposait en quantité au moment de l’attaque allemande de mai 1940. Bien pilotés et bien engagés tactiquement les Hawk 75 se montrèrent efficaces contre leurs adversaires allemands. Après l’Armistice, un certain nombre d’appareils furent conservés par le gouvernement de Vichy tandis que la Grande-Bretagne récupérait des avions évacués ou en cours de livraison, qu’elle baptisa Mohawk.

Curtiss Hawk 75 C1 n°82 G-CCVH et Stephen Grey

Stephen Grey et l’un des plus grands collectionneurs de warbirds au monde, et sa magnifique collection est basée à Duxford en Angleterre.

En restaurant ce Curtiss Hawk 75, il décida que puisqu’il avait été construit pour la France, il ne serait ni un P-36 américain ni un Mohawk britannique mais resterait un Hawk 75, dans les couleurs de la seule unité combattante connue à laquelle il appartint : le groupe de chasse II/5, qui perpétuait les traditions des escadrilles Lafayette et SPA 167.

Photo Olivier

L’histoire d’un rescapé du champ de tir

Par une enquête méticuleuse à partir d’un numéro frappé sur ce qui restait d’un longeron d’aile, Stephen Grey à abouti à la certitude que le Hawk 75 qu’il a restauré est le Hawk 75 A1 n°82. Les quelques documents retrouvés à son sujet indiquent que cet avion fut versé au groupe de chasse II/5 à Reims et fut basé à Toul durant la bataille de France (deux victoires officielles à son compte). On sait aussi qu’il fut accidenté à l’atterrissage et qu’il était en réparation à Bourges en février 1940. Ensuite il est difficile de suivre sa trace. Une hypothèse plausible est qu’il gagna l’Algérie peu avant l’Armistice, où il continua a voler. De là, il aurait été rapatrié en France à la fin de la guerre. Car on retrouve le n°82, à partir de 1946, avec la 4e escadrille à Cazaux, où il servit d’avion d’entrainement jusqu’en 1949. Il termina sa carrière militaire comme cible dans un champ de tir de Capiteux.

Photo Olivier

Lorsque le collectionneur Michel Pons le récupéra, dans les années 80, il ne restait plus grand-chose de ce qui était devenu une épave, dépourvue de moteur et aux ailes tronçonnées. En juillet 1983, Michel Berthelot fit l’acquisition du tas de ferraille, sans idée précise quant à ce qu’il pourrait en faire, sinon qu’il fallait absolument le préserver. Finalement il le céda a Raymond Capel au début de l’année suivante, qui à son tour le vendit à Stephen Grey quelques mois plus tard.

Photo Olivier

Accaparé par d’autres projets, le collectionneur britannique ne se décida à le faire restaurer qu’au début des années 2000. Souhaitant voir ce projet en vol le plus vite possible, il commanda à un atelier spécialisé en Nouvelle Zélande une aile neuve, sur laquelle fut monté un train d’atterrissage d’origine retrouvé aux USA. La reconstruction du fuselage fut confiée à un atelier californien, tandis qu’un moteur et une hélice furent achetés et révisés à neuf chez d’autres spécialistes. Tous les éléments furent assemblés à Chino, en Californie. La nouvelle fin de restauration de cette pièce unique ne fut révélée que quelques mois après son premier vol, qui eut lieu le 14 octobre 2004.

5 Commentaires

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  1. Merci pour l’article! Quel bel avion! En espérant le voir voler encore longtemps en Europe! Merci à Sir Stephen Grey!

    • bastide sur 7 octobre 2011 à 11 h 53 min
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    J’ai eu le grand bonheur de voir le Hawk 75 voici quelques années a LFA , vu qu’il fait parti de mes avions fétiche,du pur bonheur a le voir voler dans des mains d’expert aux couleurs françaises.Souvenons nous des pilotes qui ont combattus avec le Hawk 75,une très belle machine que l’on ne vois pas souvent en meeting,un grand merci a Stephen Grey.
    Christophe B.

    • aerofossile2012 sur 13 octobre 2011 à 17 h 14 min
    • Répondre

    Tres bonne idée cet article !Ils ouvrirent le bal en 1940 (apres les Polonais en 39!)et meritent un bel hommage !
    Je suppose que la deuxieme partie nous parlera du MS306 ?
    Parmis les veterans,je n’oublie pas le Caudron714 en cours de restauration au MAE et qui fut livré par la France au groupe de chasse 1/145 Warzsawa (Aviation Polonaise,Lyon Bron) avant de rejoindre la Finlande ou il fut retrouvé.J’espére qu’il pourra bientot troner dans le hall de la deuxieme GM au coté du D520 …. mais lui c’est plus tard….
    En tout cas,merci pour cet article.

  2. Quelques précisions reçues de M. Michel Berthelot par mail:

    « Mr, bonjour, venant de lire votre sujet sur le Curtiss 75, que j’avais récupéré chez Michel Pont, il y a une corection à apporter sur le type, car il s’agit d’un A-4, car en ressortant le train gauche (le droit étant tordu suite crash) j’avais retrouvé une plaque constructeur en laiton gravée Curtiss 75 type A-4, je l’avais donnée en même temps que l’épave, mais n’a pas suivi. A noter qu’à la fin il y avait 10 Curtiss à Cazaux, dont effectivement le 82. La différence se faisait par le moteur, les attaches étant différentes ( plates pour le Whright et rondes pour le P.W)
    Avec mes amitiés aéro, Michel Berthelot »

    • Yves Michelet sur 28 février 2024 à 14 h 42 min
    • Répondre

    Il me semble qu’il a été question d’un Curtiss récupéré à a Martinique (ou à la Guadeloupe) où une vingtaine d’avions de ce type avaient « échoué » en juin 1940, transportés par un bateau qui n’avait pas continué jusqu’à destination en métropole, en raison de la tournure prise par les évènements, surtout l’invasion du territoire par l’armée allemande. Le gouverneur vichyste aurait rendu les avions inutilisables par le feu (?) et aussi en coupant la partie extérieure d’une aile, ou des deux. C’est là que St. Grey aurait récupéré le sien, qui n’avait jamais volé (à part, je pense, les essais de réception aux USA).

    Connaissez-vous cette version de l’histoire ? Si vous le souhaitez, je peux essayer de consulter St. Grey.
    Il me semble qu’une épave de Cazaux ayant servi de cible aurait dû être entièrement reconstruite à partir de zéro ou presque. Je sais que, quand il ne reste plus qu’un rivet ou une tôle d’un avion, on refait un avion « authentique » autour de ce vestige !

    NB : vers 2005 ou 2006, à la fête aérienne de Granges (Grenchen en allemand), en Suisse, je n’en ai pas cru mes yeux quand j’ai vu ce Curtiss et le « MS 406 » (fortement amélioré en Suisse, à l’époque : un D-3801), suisse mais aux couleurs françaises aussi, faire plusieurs fois des tonneaux, ce que je n’aurais jamais cru à l’avance !

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